Il a été la fierté du rugby français dans les années 1920-1930, allant jusqu’à voler la vedette à Yves du Manoir. Pourtant, rien ne prédestinait Marcel Besson, Gadz’art de la promotion Cluny 119 à devenir « l’un des plus beaux athlètes qu’on ait vu en France sur un terrain d’ovale ».
Des pistes d’athlétisme…
Né le 31 mars 1901 à Verrières, petite commune du Forez, Camille Marcel Besson arrive à Cluny à l’été 1919 pour intégrer l’école des Arts & Métiers. Tout juste débarqué, il s’aligne sur un challenge local d’athlétisme (probablement à Chalon-sur-Saône) pour y disputer le 100 mètres et le saut en longueur.
Totalement inconnu et inexpérimenté, on lui rit au nez avant le concours… jusqu’à ce qu’il remporte ses deux épreuves et disparaisse aussi vite qu’il est venu ! On rapporte un temps (non officiel) de 11 secondes au 100 mètres, ce qui était alors le record de France !
… aux terrains de rugby…
Aux Arts & Métiers, Marcel Besson rencontre Gilbert Gérintès, un camarade Forézien, qui l’entraîne sur les « grounds de rugby » (comme on dit alors).
Le génie de Marcel Besson sur les terrains éclate au grand jour le dimanche 22 février 1920 face au Racing-Club Chalonnais. Qualifié en championnat de France, le RCC reçoit l’équipe de Cluny Gadz’arts Sports pour un match amical. On décide de ne pas compter les points pour ne pas humilier les sparing-partners du jour.
C’était sans compter un jeune ailier de Cluny, qui prend la balle au coup d’envoi, joue, crochète cinq joueurs du RCC et va aplatir entre les poteaux. Deux minutes après, le même ailier sprinte, crochète, feinte… et récidive dans l’en-but adverse. Besson marque cinq essais à lui seul ce jour-là ! Sa vitesse et son intelligence de jeu en font un prodige du rugby, qui étonnera tous ses adversaires et coéquipiers au fil des matches.
… et jusqu’au XV de France !
En 1922, Besson et Gérintès se retrouvent à Paris, où ce dernier est repéré pour intégrer le Club athlétique des sports généraux (CASG, futur Stade Français). Il accepte à une condition : faire venir avec lui un camarade avec qui il veut jouer. Quand Besson se présente au stade le dimanche suivant, on ricane à la vue de ce joueur petit et maigre. Mais il fait à nouveau taire les critiques sur le terrain, où il brille par ses attaques, ses crochets et ses fulgurances.
En quelques mois, Marcel Besson devient l’un des meilleurs attaquants du rugby français, grand marqueur d’essais et capitaine du CASG. Entre 1924 à 1927, il dispute six matches internationaux avec le XV de France lors des Tournois des Cinq Nations, et intègre l’équipe des JO de 1924 à Paris, tout en poursuivant sa carrière professionnelle à Vélars-sur-Ouche près de Dijon, où il dirige une fonderie dont son ami Gérintès est propriétaire.
Un esprit libre
Tout autant que son jeu, son attitude, son esprit et sa manière de vivre en dehors des terrains en font un exemple pour la jeunesse, et un modèle d’équilibre entre vie sportive et vie professionnelle.
Retiré des terrains en tant que joueur en 1928, Marcel Besson continue de partager sa passion du rugby comme entraîneur au Stade Dijonnais lors de la saison 1928-1929. Dix ans plus tard en juillet 1938, il devient le quatrième président de l’histoire du club, mandat qu’il occupe pendant 17 ans.
Pendant la guerre, son atelier de fonderie accueille des réfractaires au service du travail obligatoire (STO). En 1942, Besson (qui dirige aussi la sélection nationale de rugby des Gadz’arts) organise un match au stade Jean-Bouin au profit des prisonniers des Arts & Métiers. Il est également président de la Ligue de Bourgogne d’athlétisme entre 1940 et 1945, son indépendance politique étant saluée dans la France occupée.
Jusqu’à son décès à l’âge de 65 ans, le 31 mars 1966 à Dijon, Marcel Besson restera proche de sa passion, de son territoire d’adoption, et de ses camarades. Son esprit libre et affirmé, sa capacité à fédérer et à être écouté seront salués partout où il passera.
Sa petite-fille Camille Laurens, membre de l’Académie Goncourt, a fait de lui un personnage de roman, pour tenter de ne pas oublier celui qui fut l’un des plus grands joueurs de rugby français du début du 20e siècle.